Sommaire

    [Position] Projet de loi Climat et résilience

    9 mars 2021

     

     

    Par son article 66, le projet de loi « Climat et résilience » enrichit la définition légale du commerce équitable, en y intégrant la nécessité de flécher les investissements vers des modes de production durables. En garantissant un prix juste et des relations commerciales équilibrées, le commerce équitable permet aux producteurs de vivre décemment  de leur métier et d’investir dans la transition écologique. Commerce Équitable France se félicite de cette mesure mais invite le gouvernement à aller plus à travers quatre propositions.

     

     

    La loi climat a le pouvoir d’embarquer toute la société vers un nouveau modèle de développement plus juste, plus écologique et plus résilient. Pour y parvenir, les parlementaires doivent fixer de nouvelles règles du jeu : ne laissons pas passer cette opportunité historique !

    Julie STOLL – Déléguée générale de Commerce Équitable France

     

     

    Points clés : 

    • Si l’agroécologie est une solution reconnue pour relever le défi climatique, elle n’est pas moins complexe à mettre en oeuvre. Alors que la précarité et l’instabilité financière sont devenues la norme pour un grand nombre d’agriculteurs, comment peuvent-ils investir sereinement dans des modes de production durables ? 

     

    • Le commerce équitable est une des voies pour résoudre cette équation décisive. En créant des conditions économiques favorables (prix rémunérateurs et stables, contrats dans la durée, fonds de développement), ce modèle prouve sur le terrain qu’il permet aux producteurs de France et d’ailleurs, d’investir dans la transformation de leurs modes de production.

     

    • Pour augmenter l’impact du commerce équitable en faveur d’une alimentaire saine et durable, et qui bénéficie à tous de manière équitable, Commerce Équitable France émet trois propositions dans le cadre de ce projet de loi : restauration collective, éducation à la consommation responsable et équitable et déploiement des filières françaises de commerce équitable.

     

     

    Transition agroécologique et rémunération des producteur·rice·s : en quoi le commerce équitable permet de résoudre cette équation décisive ? 

     

    Notre agriculture et notre alimentation sont à l’origine de 25% des émissions de gaz à effet de serre. Dans le même temps, les agriculteurs sont aussi les premières victimes du dérèglement climatique (inondations, perte de rendement, etc.). Réduire le bilan carbone de l’agriculture en transformant les modes de production agricole et le contenu de nos assiettes est devenu un enjeu fondamental. 

     

    Si l’agroécologie, qui vise à tirer le meilleur des ressources naturelles sans les dégrader, est une des solutions clairement identifiées, cette transition nécessite des investissements et un accompagnement fort. En France, plus de 22 % des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté1, ce qui en fait la profession la plus exposée à la précarité, en plus d’être la plus vulnérable face aux changements climatiques. Chaque année, des centaines d’entre eux mettent fin à leurs jours dans le désarroi le plus total. Ces métiers essentiels souffrent et disparaissent2, non sans poser des enjeux très préoccupants de sécurité alimentaire.

     

    Or, comment investir dans le changement et s’inscrire dans la transition écologique quand la précarité économique et l’instabilité financière sont devenues la norme ? Nous ne pourrons répondre au défi climatique tant que nous n’apportons pas une réponse conjointe à la crise sociale et économique que traversent les secteurs de l’agriculture et de l’alimentation. Seul un commerce plus équitable peut permettre de résoudre cette équation, décisive pour les générations présentes et futures.

     

     

    Le commerce équitable : un partenariat où tous les acteurs d’une filière s’engagent dans l’accompagnement des transitions. 

     

    En garantissant un prix rémunérateur, des engagements commerciaux dans la durée et un fonds de développement qui alimente des projets collectifs, les partenariats de commerce équitable permettent aux producteurs de vivre décemment de leur métier, d’avoir une visibilité économique, de construire un tissu relationnel sécurisant et un partage des risques propices à l’accélération des mutations agricoles. Cette sécurité économique est une condition déterminante pour leur permettre d’investir dans la transition écologique de leurs modes de production. 

     

    Les conditions du commerce équitable permettent aux organisations de producteurs d’accélérer la transition vers l’agriculture biologique3. Aujourd’hui 85% des produits équitables issus des filières internationales sont bio et on observe la même dynamique pour les filières françaises plus récentes. Le commerce équitable permet également de relocaliser et développer des filières françaises stratégiques comme les protéines végétales, allant dans le sens d’un alimentation saine et moins carnée. 

     

     

    Par son article 66, le projet de loi « Climat et résilience » reconnaît l’apport du commerce équitable à la transition écologique et sociale et améliore les conditions de sa reconnaissance auprès des consommateurs. 

     

    • Il complète la définition légale du commerce équitable4, en y intégrant les objectifs d’investissement dans l’agroécologie et la protection de la biodiversité (facteurs décisifs de résilience et de stratégie bas carbone). 

     

    • Il rend obligatoire le recours à un label pour les entreprises se réclamant du commerce équitable, en s’appuyant sur une reconnaissance publique de ces derniers. 

     

    Si l’article 66 est une avancée pour renforcer les impacts du commerce équitable, le projet de loi peut aller plus loin pour renforcer le développement du commerce équitable et contribuer plus fortement au changement culturel nécessaire à l’adoption plus large d’une alimentation saine et durable. 

     

     

    Les propositions portées par Commerce Équitable France :

     

    Commerce Équitable France, émet 3 propositions complémentaires pour aller plus loin :

     

    1. Éducation à la consommation responsable et équitable : cette proposition vient compléter le volet éducation au développement durable du projet de loi (article 2), en intégrant un objectif de sensibilisation et d’éducation à la consommation responsable et équitable.

     

    L’éducation et la sensibilisation à la consommation responsable et équitable contribuent à faire émerger de nouveaux comportements individuels et collectifs et à changer en profondeur les pratiques de consommation de notre société. L’éducation à la consommation doit permettre aux citoyens de tous âges d’approfondir la compréhension des interactions complexes entre modes de consommation et enjeux environnementaux, climatiques, sociaux, économiques et sanitaires.

     

    2. Restauration collective : une proposition visant à élargir aux produits issus du commerce équitable, la liste des produits éligibles aux 50% d’alimentation saine et durable que doit atteindre la restauration collective.

     

    Dans la mesure où ce projet de loi reconnaît le commerce équitable comme un outil de la transition agroécologique, et sécurise son périmètre à travers l’obligation d’utiliser des labels reconnus publiquement, cet amendement vise à élargir aux produits issus du commerce équitable, la liste des produits éligibles aux 50% d’alimentation saine et durable que doit atteindre la restauration collective publique et privée.

     

    3. Créer un fonds de structuration pour le déploiement du commerce équitable en France.

     

    Si les organisations de commerce équitable international (associations, entreprises, labels) bénéficient de soutiens structurants issus de l’aide publique française au développement – projets bénéficiant d’ évaluations positives (en termes de croissance économique, de notoriété auprès des consommateurs, de développement de nouvelles filières et d’accompagnement des organisations de producteurs dans les pays en développement) – , la structuration et le déploiement des filières françaises de commerce équitable ne bénéficient d’aucun soutien public structurant à l’heure actuelle alors même que les effets du commerce équitable convergent largement avec les objectifs du plan de relance du gouvernement. Un plan national transversal permettrait de renforcer les accompagnements à l’ensemble du secteur.

     

    Et co-porte une 4ème proposition avec la coalition #NousSommesDemain5

     

    4. Mettre en place une TVA réduite pour les produits issus du commerce équitable pour rendre la consommation équitable et durable accessible au plus grand nombre.

    À l’heure actuelle, les bonnes pratiques sociales et environnementales représentent avant tout un coût dans le compte de résultat des entreprises, et peuvent constituer un frein au développement économique de celles qui s’engagent dans des stratégies qui visent à relever le défi climatique. En effet, les entreprises de commerce équitable, comme toutes les entreprises à impact, internalisent dans leur business model le coût de leurs (bonnes) pratiques sociales et environnementales, et font face, sur le marché, à la concurrence d’entreprises qui, à l’inverse, externalisent ces coûts cachés sur la société – et proposent donc sur le marché, des produits comparables mais moins chers.

     

    Pour réduire le différentiel de prix avec des produits conventionnels, la TVA différenciée devient un levier puissant d’accélérer la transition écologique : elle permet de renforcer la compétitivité prix des produits écologiquement vertueux et de rendre la consommation équitable et durable accessible au plus grand nombre.

     

     

    Sources

    1 Insee, 2016
     
    2 Alors que la part des emplois agricoles dans l’ensemble du marché du travail était de 31 % en 1955, elle est passée à 8,8 % en 1981, pour tomber à 3,3 % aujourd’hui. » Source : Jérémie Lamothe, Agriculteurs : les raisons du malaise, Le Monde, 15/02/2016 
     
    3 Étude du Basic pour Commerce Equitable France, 2019 : Revenu des producteurs et transition agroécologique : quelles contributions du commerce équitable France ? 
     
    4 La définition légale du commerce équitable (article 94 de la loi sur l’Économie Sociale et Solidaire de 2014)  
     
    5 Les propositions de la coalition #NousSommesDemain dans le cadre du projet de loi Climat & Résilience
     

    À LIRE AUSSI

    Pour une fiscalité sociale et écologique

    Page

    Pour une fiscalité sociale et écologique

    Campagne en faveur d'une fiscalité sociale et écologique

    Pour rendre accessible au plus grand nombre des produits sains qui rémunèrent correctement les producteur.ice.s., Commerce Équitable France propose de mettre en place une fiscalité sociale et écologique dans le projet de loi de finance 2021.

    Lire la suite

    3 amendements en faveur d’une TVA réduite pour les produits issus du commerce équitable

    Actualité | 24.11.2020

    3 amendements en faveur d’une TVA réduite pour les produits issus du commerce équitable

    Pour une fiscalité sociale et écologique

    Dans le cadre de nos travaux de plaidoyer, nous avons convaincu trois groupes de sénateur·ice·s de déposer un amendement proposant une TVA réduite pour les produits issus du commerce équitable. 

    Lire la suite

    Commerce équitable et climat : que dit l’article 66 sur le commerce équitable ?

    Actualité | 10.02.2021

    Commerce équitable et climat : que dit l’article 66 sur le commerce équitable ?

    La position de Commerce Équitable France

    Le projet de loi climat parle du commerce équitable dans son article 66. Retrouvez la position de Commerce Équitable France.

    Lire la suite